mercredi 13 août 2014

Qui peut sauver le soldat anglais?

Le constat est éloquent, depuis 1966 l’équipe d’Angleterre s’est abonnée à faire de la figuration dans les grandes compétitions internationales que sont l’Euro et la Coupe du Monde. En effet, il faut remonter jusqu’en 1990 et le mondial italien pour voir les sbires de la reine d’Angleterre terminer dans le dernier carré (défaite au tirs au but contre l’Allemagne, encore eux!). Au niveau européen, les “Three Lions” sont entrés une seule fois en demi-finale depuis 1968. C’était en 1996, à la maison, pour une défaite encore aux tirs au but et encore contre les allemands (décidément, ils sont partout). 

A contrario, son championnat local est l’un des plus côté du monde, tout du moins sur le plan médiatique. Le “big five” (Manchester City et United, Chelsea, Liverpool et Arsenal) et ses stars animent la Premier League et proposent du spectacle avec quelques outsiders potentiels qui pointent le bout de leur nez (Tottenham, Everton ou Newcastle) selon les saisons.
Est-ce suffisant pour que le niveau de la sélection nationale tende vers des jours meilleurs? A priori, non. Pourquoi cette sélection n’en branle pas une lors des grands rendez-vous? Quelques pistes de réflexion.


Ça y est, Roy pleure déjà avant la fin...


Une formation bancale.
La formation des jeunes anglais n’est pas très réputée aux yeux des experts et ils ont majoritairement raison. D’une part, il faut dire que les techniciens du pays ne sont généralement pas des lumières à côté de leurs homologues français, allemands, espagnols, néerlandais, italiens voir même portugais. L’enseignement du football n’est pas une spécialité locale et les éducateurs anglais possèdent très souvent un train de retard (ou plusieurs!) sur ce qu’il se fait de mieux en terme d’apprentissage du football aux jeunes footballeurs en herbe. Pour preuve, en Premier League, même pas la moitié des clubs sont gérés par un coach de nationalité anglaise (9/20). Cela n’est pas qu’une simple coïncidence, les présidents de club ont très vite compris que les meilleurs techniciens étaient rarement des anglais.
D’autre part, le système de la formation anglaise subit régulièrement des restructurations ou des modifications qui n’apportent aucune stabilité et surtout très peu de résultats sur le long terme, même si évidemment des joueurs professionnels sortent tout de même des centres de formation. En effet, plusieurs points de règlements ne favorisent vraiment pas la quantité et la qualité des joueurs produits par la nation aux trois têtes de lions. 
Premièrement, les heures d’entraînement sont strictement limitées. Un jeune joueur anglais ne peut dépasser 6 heures de football pendant une semaine. Entre 9 et 21 ans, il ne peut toucher le ballon que 3760 heures, contre généralement presque 6000 heures pour les Pays Bas et la France (chiffres datant de 2010).
Ensuite, il y a les restrictions géographiques : un gamin de moins de 16 ans peut rejoindre un centre de formation seulement s’il crèche à 90 minutes maximum. Ce temps est diminué à 60 minutes pour les moins de 13 ans. En France, cela impliquerait qu’un gamin déniché par Rennes dans un club de la région parisienne ne pourrait pas rejoindre son centre et bénéficier de tout le savoir faire des techniciens rennais. Un désastre.
Enfin, la compétition est un non sens pour la progression des enfants. Effectivement, la quarantaine de centres de formation (allant des clubs de PL jusqu’en D4 anglaise) sont mélangés dans 4 groupes d’une dizaine d’équipes de niveaux complètement inégaux. Pour faire à nouveau le parallèle en France, imaginons les 16 ans nationaux mélangés avec des équipes de niveau régional et départemental, bref, il ne vaut mieux ne pas se l’imaginer finalement.




Des joueurs qui ne s’exportent pas.
Bien rares sont les joueurs british qui ont brillé hors de leurs frontières. Les marseillais se souviennent bien d’un certain Chris Waddle, formidable compère de JPP durant la belle époque du club olympien. D’autres ont aussi réussi à traverser la manche depuis les années 90, avec plus ou moins de succès : le terrible Paul Gascoigne, alias "Gazza" (Lazio, Glasgow Rangers), Steve McManaman (Real Madrid), Mickael Owen (Real Madrid), Owen Hargreaves (préformé au Bayern Munich, tiens tiens) et l’inévitable star David Beckham (Real Madrid, Milan AC et PSG). Ensuite? Eh bien… Peut-être quelques méconnus ont tenté leur chance en plongeant dans la Manche pour tenter de rejoindre un club européen à la nage comme Tyron Mears avait pu le faire en débarquant à l’OM, mais le constat est très clair. Autre statistique qui étaye ce triste bilan, 22 des 23 joueurs sélectionnés pour le mondial 2014 par Roy Hodgson appartiennent à des clubs anglais. Et encore, le seul qui n’est pas de ces 22 joueurs est Fraser Forster, le troisième gardien qui évolue au Celtic Glasgow…
Les clubs européens ne raffolent vraiment pas des “pépites” anglaises. Impossible de se mentir sur le sujet, les chiffres parlent d’eux mêmes et la fédération anglaise de football (FA) doit se poser les bonnes questions :  "Pourquoi nos joueurs ne s’exportent pas?" Parce qu’ils considèrent la PL comme le meilleur championnat du monde? La branlette, ça va cinq minutes, en plus il paraît que ça rend sourd. 




Quel est le véritable niveau de la  Premier League?
Interressant de se poser la question qui a matière à partager les avis. Certains avancent que la PL est le meilleur championnat du monde, mais qu’est-ce qu’ils entendent par “meilleur”? Quel est leur définition de ce mot? Meilleur spectacle? Sur ce critère, aucun doute, ce championnat est le meilleur du monde.
Le meilleur tactiquement parlant? Déjà, cette interrogation commencerait par faire tousser plus d’un “pro-PL”. Effectivement, le “box to box” proposé par les équipes d'outre Manche favorise les espaces entre les lignes, les énormes erreurs de placement et les largesses de marquage sur le plan défensif. Il y aura toujours quelques exceptions comme le Chelsea de Mourinho ou probablement le MU de Van Gaal mais pour le reste du paysage, le côté tactique est relayé au second plan. On attaque et on verra. C’est une philosophie, mais elle manque un peu d’intelligence pour parvenir à ses fins dans le gratin européen et mondial.




Les représentants de l’Angleterre se font rares en Ligue des Champions.
Quoi de plus enrichissant pour un joueur professionnel que de se frotter aux meilleurs clubs d’Europe lorsque celui ci évolue dans l'un des championnats du continent? La Ligue des Champions permet d’affronter une diversité d’adversaires qui donnent aux joueurs une réelle expérience internationale, et ce tous les ans. Ainsi, ils doivent s’adapter à de multiples facteurs (météo, état des terrains, stade hostile, ambiance électrique, adversaires très rugueux, …) pour réussir à tirer leur épingle du jeu. Sauf que voilà, les joueurs de nationalité anglaise ne sont pas nombreux dans cette compétition, voir parfois inexistant à partir d’un certain stade. Allez, un peu de chiffres pour mettre le doigt là où ça fait mal.
Sur les 3 dernières saisons de la LDC, le nombre d’anglais présents à partir des quarts de finale :
  • 2013/2014 : 11 anglais (10%) (Chelsea et MU)
  • 2012/2013 : 0 anglais (0%)
  • 2011/2012 : 5 anglais (4,5%) (Chelsea vainqueur)
Sur ces 3 saisons cumulées, ils ne sont que 12 a avoir disputé des matchs au dessus des 
huitièmes de finale en LDC. Encore une fois, ces faits sont effrayants pour les “Tree Lions”.

Recherche buteur et gardien de grande classe.
Wayne Rooney a inscrit son tout premier but lors d’une phase finale de coupe du monde très récemment, contre l’Uruguay. Il n’y a pas comme une anomalie? Ou est le grand buteur de l’équipe d’Angleterre? Ce mec présent au bon moment dans la surface, qui claque un pion sur sa première occasion dans une compétition importante. Celui qui totalise quelques buts lors des très grands rendez vous internationaux. Le Thomas Muller anglais quoi, ou est-il? Pour l’instant, absent et depuis déjà quelques décennies. 
A l’autre extrémité du onze de Roy Hodgson, le portier Joe Hart. Bon, pas si dégueulasse que ça le bonhomme mais ce n’est pas non plus un gardien d’exception. L’Angleterre et ses gardiens, c’est bien connu, c’est une grande histoire d’amour. Même si Hart a contribué à pacifier un peu cette love story, le manque cruel d’excellents gardiens britanniques est flagrant. En effet, ils n’étaient pas gâté avec les Seaman, Robinson ou encore l’inimitable David “Calimity” James, allez pour le plaisir un extrait d’une merveilleuse boulette :



Un système de formation à revoir, des techniciens pas assez compétents, des joueurs inexistants dans les autres championnats, un niveau général de la Premier League qui se discute, des anglais trop peu nombreux en Ligue des champions ou encore un manque de grands joueurs aux postes clefs. La non exhaustive liste est plutôt bien fournie pour donner un début d’explication aux échecs successifs des petits protégés de la Reine Elisabeth. 
Y a du boulot...

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