Le Portugal en plein chantier

Les désillusions deviennent monnaie courante pour les coéquipiers de Cristiano Ronaldo, qui a lui seul, ne peut porter une sélection hantée par un palmarès vierge et sous pression de l'attente de tout un peuple. L'élimination prématurée au Brésil a déjà fait très mal aux portugais mais la récente défaite contre l'Albanie à domicile en éliminatoires de l'Euro 2016 n'a fait qu'ajouter un peu (beaucoup) d'huile sur le feu. Retour sur les principales raisons de ce chaos qui ne semble pas alarmer la Fédération Portugaise de Football (FPF).

Bento, un sélectionneur en mousse

Sa communication ne laisse pas sans rappeler celle d'un sélectionneur français très ancré dans la mémoire des français. On parle bien de Domenech. D'ailleurs ses choix inamovibles ne laissant pas de place aux changements et aux pépites portugaises aussi (ou alors aux mauvaises pépites, notamment contre l'Albanie), rappellent notre bon vieux Raymond. Peut-être qu'ils sont amis, qui sait?

Cela faisait quatre longues années que la seleção était gérée par Paolo Bento, personnage froid et sur de ses choix. Le désormais ex-sélectionneur portugais n'a jamais réussi à imprimer une réelle philosophie de jeu durant son mandat, si ce n'est mettre de l'impact et se reposer sur le talent individuel de CR7 ainsi que de Nani et Moutinho, à moindre mesure.

Certains de ses compatriotes sont de vrais tacticiens, des pros du tableaux noirs comme l'inévitable José Mourinho, l'élégant Andres Villas Boas ou encore le précoce Léonardo Jardim. Mais la FPF n'avait vraiment pas miser sur le bon cheval, une fois de plus. 

A force d'obstination, de mauvais choix, de communication bancale et surtout de résultats de plus en plus inquiétants, l'un des hommes les plus détestés du pays est tenu pour grand responsable de cette débâcle. Après la défaite contre l'Albanie, il a enfin eu la lucidité de laisser sa place (poussé par la FPF?). Une première vraie bonne nouvelle pour la seleção.

"Hein?! j'suis viré ???"

Avant centre, ou es tu?

Autre chantier complètement saboté par Bento, l'attaque. Le monde entier est au courant, le Portugal n'a pas de numéro 9 performant et efficace. Hugo Almeida rend bien des services mais reste trop limité pour être le vrai buteur de l'attaque lusitanienne, il jouerait à merveille le rôle de doublure d'un très bon attaquant. Helder Postiga quant à lui est sur le déclin et n'a vraiment jamais convaincu au poste même s'il a tout de même planté 27 pions, mais très peu lors des grandes compétitions. Paolo a même poussé le vice très loin en faisant appel à un drôle d'oiseau répondant au joli nom d'Eder. Inutile de se pencher sur le cas d'un garçon qui ne totalise qu'une petite trentaine de buts en 7 saisons de Liga Sagres sous les couleurs de l'Academica Coimbra et du Sporting Braga pendant que le capitaine portugais enfile ce total en une seule saison avec son club, le Real Madrid.

Alors comment faire? Déjà se pencher sur la base du problème. Pauleta, directeur sportif de la formation portugaise, semble avoir pris conscience du problème pour tenter d'y remédier : "Cette problématique date et elle est difficile à expliquer. Nous devons travailler plus à la base, œuvrer plus sur le travail spécifique des attaquants." Mais ça, ça prend du temps.

Alors que faire bordel? Au lieu de s'entêter avec des solutions qui n'en sont pas vraiment (Postiga et Eder), Bento n'était pas vraiment tenté à l'idée de miser sur un jeune prometteur avec un gros potentiel, pour jouer les doublures derrière Almeida et lui donner progressivement du temps de jeu. Oui mais lequel? Y a-t-il vraiment un joueur de talent au poste de numéro 9 qui émerge dans les sélections de jeunes? Pas si sur. Quoi qu'il en soit, Bento s'était mis en tête la solution "Eder" et il n'en aura jamais démordu. 

La solution qui sautait aux yeux de tout le monde : recentré Cristiano Ronaldo puisque le pays entier est en déficit d'avant centre confirmé et ne forme que des ailiers vif et technique au niveau offensif. Même si ce dernier n'était pas forcément partant à l'idée d'aller au charbon face aux bœufs défensifs que sont certains défenseurs centraux, Bento avait déjà composé ainsi quelques fois. C'était peut-être la solution la plus logique, mais Bento est apparemment un homme droit dans ses bottes, qui n'aime pas trop réfléchir et préfère s'entêté sur ce qui a parfois marché temporairement.

Cristiano : "Pfff... Qu'est-ce qu'il est zéro celui là..."

CR7 dépendance

Puisque cette sélection est incapable d'avoir une identité de jeu, elle s'en remet forcément aux exploits de ses individualités, il y en a pas 36 dans cette équipe : Cristiano Ronaldo. Le numéro 7 du Real Madrid a endossé le costume de sauveur lors des barrages de la coupe du monde face à la Suède où il qualifie son pays à lui tout seul. Mais, lorsque la bande à Bento se pointe au Brésil pour se frotter au gratin mondial, cette solution est bien trop juste, surtout que l'attaquant formé au Sporting jouait entre 50 et 70% de ses moyens après avoir subi une blessure au genoux en fin de saison dernière.

Plus récemment, le Mister n'était pas sur le terrain pour sortir ses compatriotes de la merde au stade d'Aveiro face à l'Albanie (défaite 0-1) pour le premier match des éliminatoires de l'Euro 2016. Alors effectivement, la question se pose : Le Portugal dépend-il des exploits de son ballon d'Or? Ou alors Bento a-t-il rendu le Portugal dépendant de CR7? Au choix.

"Ici, c'est moi le patroooooon"

Des joueurs sur le déclin et fragiles (physiquement / mentalement)

Titularisés confortablement et quasi systématiquement certains cadres de la seleção n'étaient clairement pas au niveau depuis des mois : Veloso et Meireles par exemple, n'ont clairement plus le rendement de leurs belles périodes.

D'autres complètement à côté de leurs pompes sur le plan psychologique, mais cela n'est pas une nouveauté pour un joueur comme Pepe, expulsé plus que bêtement contre l'Allemagne et son agaçant Thomas Müller.

Enfin, cela n'a échappé à aucun observateur de cette sélection, l’hécatombe de blessés pendant la coupe du Monde laisse penser que notre cher Paulo Bento n'avait pas embarqué avec lui les hommes les plus en forme du moment. Le détour d'une dizaine de jours aux "States" et l'arrivée tardive sur les terres brésiliennes n'ont certainement été des choix judicieux, encore une fois.

Bref, quand ça va pas, tout va mal.

Bento : "T'es rincé !"

Meireles : "Hein?"

Fernando Santos pour rebâtir

Réputé pour diriger des formations bien organisées et efficace, la FPF a peut-être trouvé en l'ex sélectionneur de la Grèce un coach capable de remettre un peu d'ordre dans la maison portugaise, même si ce dernier ne fait guerre l'unanimité au pays. 

Certains changements sont à prévoir car Santos désirera surement incorporé du sang frais comme Carlos Mané, Bruma, Raphaël Guerreiro ou encore Marcos Lopes prêté à Lille par Manchester City.

Sacrée mission pour le nouveau sélectionneur lusitanien qui devra impérativement trouver un début d'équilibre sur ce champ de ruines. Premiers éléments de réponse le 11 octobre au Stade de France, face à la bande à Deschamps.